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Un champignon sans pied qui sent le poulet : c’est le Polypore soufré !

Un champignon sans pied

Le Polypore soufré (Laetiporus sulphureus) est un champignon assez particulier : il pousse directement sur les arbres, vivants ou morts. En effet, il n’a pas de pied, seulement une base épaisse nommée « chapeau », située dans le prolongement du sporophore, la partie aérienne des champignons, et sur lequel vient s’imbriquer plusieurs individus. Ce chapeau est d’abord en forme de tubercule puis devient un peu plus irrégulier et bosselé avec une marge plutôt arrondie et ondulée. Il est de couleur jaune à orange, parfois blanchâtre au-dessus et jaune citron ou jaune soufré en dessous. Il est constitué de plusieurs couches successives et d’une multitude de petits tubes. 

Le Polypore soufré mesure de 10 à 60cm de large, de 10 à 30cm de profondeur et de 1 à 5cm d’épaisseur environ. 

Le bois mort comme met préféré

Présent du printemps à l’automne, le Polypore soufré pousse en plaine et aime les zones humides aux températures assez basses. Il n’est également pas rare de le voir après d’importants épisodes pluvieux qui amènent une certaine humidité qu’il apprécie tout particulièrement. 

C’est un champignon très abondant qui se rencontre notamment dans les forêts de feuillus comme les chênes, les châtaigniers, les peupliers, les robiniers voire parfois les pruniers et les platanes, et plus rarement les conifères. On peut le rencontrer sur des arbres vivants où il peut recouvrir un tronc entier, mais ils apprécient particulièrement les arbres morts en décompositions. C’est un champignon saprophyte : il se nourrit de substances mortes en détournant les substances nécessaires à son développement au détriment de l’arbre. En se nourrissant de cette matière organique en décomposition, il sécrète un liquide jaunâtre à brun qui va se répandre sur d’autres arbres, vivants ou morts. 

De ce fait, il est parfois considéré comme un champignon parasite : il s’incruste dans les plaies de l’écorce de ses hôtes qu’il achève sur plusieurs années. Essentiel sur des troncs abattus, des souches et branches diverses, il a donc un rôle écologique assez important dans la décomposition des végétaux notamment des arbres. 

Le poulet des bois 

Comestible, il se consomme uniquement quand il est jeune car en vieillissant, il s’effrite et devient trop coriace. Sa chair est assez molle et a une forte odeur de poulet et de champignon de Paris à son stade juvénile. Nos amis anglo-saxons l’ont même surnommé « chicken of the wood », le poulet des bois. En effet, d’aspect, de texture et même de goût, sa chair ressemble à celle du poulet. Attention car mangé cru, il peut provoquer des effets secondaires chez certaines personnes (maux de ventre, vertiges…).

 

Son cousin géant

Âgé ou desséché, on peut facilement le confondre avec son cousin le Polypore géant (Meripilus giganteus). Mais chez ce dernier, également comestible, le chapeau est ocre et de forme plus arrondie mais surtout il noircit avec l’âge. 

Si vous rencontrez un Polypore soufré lors de vos balades en forêt, n’hésitez pas à partager vos observations grâce aux Missions forêt de Noé ! Voici un lien pour vous rappeler comment participer à ces quêtes et un tutoriel vidéo pour savoir comment ajouter vos observations via l’application INPN Espèces. Alors bonnes recherches et bonnes observations à tous ! 

Allumez le feu avec l’Amadouvier

Ni animaux, ni végétaux, les champignons forment un règne à part appelé la « fonge » (Fungi). D’une grande diversité, il existe près de 9 600 espèces de champignons à chapeau et plus de 3 000 lichens rien qu’en France métropolitaine (100 chiffres expliqués sur les espèces – INPN, 2020). Capables de coloniser n’importe quel milieu, les champignons poussent dans tous types de forêts tant que les conditions environnementales le leur permettent.

Bien particuliers, ils sont à la fois visibles et invisibles : même si vous ne les voyez pas, ils sont bel et bien présents ! En effet, ils sont constitués d’un vaste réseau de filaments appelé mycélium, présent sous terre ou dans les arbres, qui représente 99% de leur poids. Et lorsque les conditions de température et d’humidité sont favorables, il y a fructification : deux de ces mycélium dits primaires fusionnent pour donner un mycélium secondaire en surface, qu’on appelle carpophore (ou sporophore). C’est l’appareil reproducteur, qui n’équivaut qu’à 1% du poids du champignon dans son ensemble ! Il correspond au champignon visible, celui du langage courant, avec un chapeau et parfois un pied.

Le « champignon » auquel on s’intéresse aujourd’hui est l’Amadouvier (Fomes fomentarius). C’est un basidiomycète, de la classe Agaricomycetes et de la famille des Polyporacées. Dépourvu de pied, ce champignon pousse en forme de sabot de cheval (ou de console) sur le tronc des arbres.

© Amadouvier (Fomes fomentarius) – Visions Pictures

Pouvant atteindre jusqu’à 50cm de diamètre, son chapeau massif arbore une teinte brun foncé quand il est jeune, qui vire par la suite au brun pâle voire grisâtre. Il est bossu au sommet et gravé de sillons concentriques formant des bourrelets jusqu’à la marge qui délimite le bourrelet inférieur (le plus jeune). Cette dernière est irrégulière et de couleur claire. L’hyménium, la partie fertile du carpophore, se trouve sur la face inférieure de l’Amadouvier. Il est constitué de tubes longs et stratifiés, de couleur ocre à brunâtre, qui débouchent sur des pores de toute petite taille, gris à brunâtre. Les organes de dissémination, appelés spores, s’en échappent et se répandent avec le vent, jusqu’à finir sur un support où un nouveau mycélium primaire pourra se développer.

On trouve l’Amadouvier sur les hêtres principalement, mais aussi sur d’autres feuillus comme les peupliers et les platanes, et exceptionnellement sur des résineux. Il s’installe sur son hôte vivant à l’occasion d’une blessure et le parasite jusqu’à sa mort. Arrivé à ce stade, le champignon se maintient sur son arbre et devient saprophyte, c’est-à-dire qu’il se nourrit du bois en décomposition. Ainsi, il peut vivre plusieurs années sur son hôte : c’est une espèce pérenne.

© Amadouviers (Fomes fomentarius) – Cyril Ruoso

Un champignon aux utilités diverses

Pour les gourmands, l’Amadouvier n’est malheureusement pas un champignon que l’on mange : non pas qu’il soit toxique, mais sa chair coriace lui enlève tout intérêt culinaire.

On peut noter cependant son utilité toute autre pour la préparation de l’amadou. Très inflammable, la chair de l’Amadouvier a été utilisée dès la Préhistoire comme combustible : il suffit d’une étincelle pour qu’elle prenne feu. Cette propriété lui a valu le nom de « polypore allume-feu ».

L’Amadouvier a également servi en médecine pour ses vertus cicatrisantes et hémostatiques : ainsi, il faisait office de pansement pour les blessures légères.

Risque de confusion avec le Polypore marginé

Attention à la confusion avec le Polypore marginé (Fomitopsis pinicola) ! Ce champignon basidiomycète appartient lui aussi à la classe Agaricomycetes, mais fait partie de la famille des Fomitopsidacées. Tout comme l’Amadouvier, le Polypore marginé ne possède pas de pied et pousse en forme de sabot de cheval. Il est cependant de taille plus petite, et son habitat préférentiel est différent : s’installant sur les souches et troncs d’arbres le plus souvent morts, il affectionne principalement les résineux, bien qu’il ne soit pas rare de le trouver sur des feuillus. De plus, les couleurs de son chapeau vont du noir près du bois de l’arbre, au jaune-orangé / rouge vers l’extérieur, tandis que la marge du champignon est plutôt blanc crème.

© Polypores marginés (Fomitopsis pinicola) – SPL Science Photo Library / Bjorn Svensson

Sources :

Office National des Forêts (ONF) – Les champignons

Office National des Forêts (ONF) – Fiche champignon : Amadouvier

Au jardin – Amadouvier, Allume-feu

Futura Planète – A la découverte de l’Amadouvier

À la chasse… aux champignons !

L’Observatoire de la Biodiversité des Forêts vous propose, en ce mois de novembre, de rechercher plusieurs espèces de champignons, comme la Langue-de-boeuf ou le Polypore soufré. Mais une promenade en forêt est souvent aussi l’occasion de chercher des champignons à consommer ! S’ils sont un délice pour nombre d’entre nous, il faut néanmoins les récolter avec prudence et circonspection. Munis de votre guide et de votre équipement, vous pourrez déguster vos poêlées sans vous intoxiquer.

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Les bonnes conditions

S’il est vrai que l’automne est le temps des grandes poussées, des champignons tels que les morilles peuvent faire leur arrivée au printemps, puis à partir de la fin de l’été. Néanmoins, la venue des pluies associée à des moments de chaleur propres à l’automne réunissent les conditions idéales pour l’apparition de champignons. Mettez votre réveil pour une excursion matinale un jour de soleil quelques jours après un épisode pluvieux.
Il est nécessaire de bien connaître les espèces les plus fréquentes, à l’aide d’un ouvrage de référence ou d’une application qui les recense. Il est par ailleurs plutôt conseillé, lors de votre première sortie, d’être accompagné·e par un proche qui connaît bien la zone ou de faire appel à l’association de mycologie de votre région. Ces personnes seront à même de vous faire découvrir les meilleurs coins à champignons (jalousement gardés par les habitué·es) et proposent des sorties ouvertes aux amateurs.

Quel matériel employer ?

En plus de l’attirail de la sortie en forêt (vêtements résistants et bonnes chaussures), quelques instruments sont adaptés : un panier en osier de préférence pour y déposer délicatement votre cueillette (les puristes en recouvrent le fond d’un lit de fougères). A éviter : le sac plastique qui fera fermenter trop rapidement vos champignons, ce qui les rendrait impropres à la consommation. Une paire de gants est de mise pour éviter les risques de contamination si vous veniez à cueillir un champignon toxique. Enfin, ayez dans votre besace le fameux couteau à champignons pour faciliter la récolte du champignon et le nettoyer à l’aide du pinceau.

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Couper ou arracher, telle est la question !

Quel plus grand débat chez les mycologues que celui de couper ou arracher les champignons lorsqu’on les cueille ? Si longtemps la réponse semblait évidente, la coupe ayant le vent en poupe, aujourd’hui les plus averti·es vous répondraient le contraire. Il semblerait préférable de les arracher, tout d’abord pour faciliter l’identification du fruit de votre cueillette. Par ailleurs, et contrairement à ce que l’on pourrait penser, on participe à la conservation du mycélium en arrachant le pied, plus qu’en le coupant, afin d’en éviter le pourrissement et permettre une relance de la croissance de futurs champignons. Lors de l’arrachage, deux règles à respecter : prélever le champignon en faisant délicatement tourner le pied, et reboucher le trou avec un peu de terre ou de feuilles mortes pour éviter le dessèchement du mycélium.

Nous laissons ces méthodes à votre appréciation !

Avoir une cueillette responsable

La loi stipule qu’il n’est pas permis de cueillir les champignons dans une propriété privée à moins qu’on vous le permette. La récolte sur les espaces communaux n’est théoriquement pas autorisée mais elle se pratique dans les faits. Privilégiez les forêts ou les prairies ouvertes à tous.

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Pour éviter l’empoisonnement, vous ne récolterez pas vos champignons au bord des routes, des champs ou des zones industrielles. En effet, le risque de pollution y est beaucoup plus élevé qu’ailleurs et le champignon absorbe ces éléments toxiques.

Afin de prévenir tout impair, abstenez-vous de cueillir les champignons à lame blanche, anneau et volve, car ils peuvent être toxiques.

Par ailleurs, ne cueillez pas de champignons trop vieux : d’une part, ils peuvent être impropres à la consommation, voire toxiques. D’autre part, ils vont produire des spores, ce qui facilitera la pousse d’autres champignons.

N’hésitez pas à faire vérifier votre cueillette, chez un pharmacien ou auprès d’une association mycologique. Consommez rapidement vos champignons, à moins de les congeler, les sécher ou les mettre en conserve.

Si jamais vous soupçonnez une intoxication (nausées, vomissements, tremblements) appelez le 15. Face à l’augmentation du nombre d’intoxications liées à la consommation de champignons, l’Anses et Minsolisante mettent en garde les amateurs de cueillette et rappellent les bonnes pratiques à respecter.

Pour en savoir plus à ce sujet : https://www.anses.fr/fr/system/files/PRES2019CPA16.pdf